Elle est considérée comme la première phytothérapeute moderne. Parmi les multiples remèdes qu’elle a mis en place, et qui se sont révélés de véritables miracles pour les malades qui venaient la voir, les soins par les pierres sont absolument fondamentaux.
Contrairement aux croyances de l’Église de cette époque, elle ne pensait pas que les pierres précieuses étaient des objets de luxure et de péché, mais des éléments fondamentaux de la création de l’univers, liées à la vie même de l’individu et à sa mission sur terre.
Son enseignement constitue une base incontournable de la lithothérapie. Il mêle tant la science (la religieuse était bien au fait des avancées scientifiques de l’époque et semblait étonnamment en avance sur son temps), que la spiritualité (faire correspondre le minéral et l’humain dans une harmonie essentielle).
Née le 16 septembre 1098 près d’Alzey en Hesse rhénane, Hildegarde de Bingen s’éteindra le 17 septembre 1179 à Ruppertsberg, près de Bingen, bourgade qui lui donnera son nom.
Hildegarde de Bingen est une religieuse bénédictine, mais aussi une femme de lettres, de sciences, canonisée par l’Église catholique au XIIe siècle. En 2012, le pape Benoît XVI la proclame docteur de l’Église. C’est la quatrième femme à obtenir cette distinction, la plus haute de l’Église.
Si le Moyen-âge est décrit comme une période obscure, on dira qu’Hildegarde de Bingen l’a grandement éclairé. En combinant ses dons de voyance et de guérisseuse avec les remèdes populaires et les écrits médicaux savants, elle deviendra extrêmement connue à son époque.
Nous avons la chance de disposer de tous ses écrits qui évoquent ses visions mystiques, mais aussi toutes ses pratiques médicales. La part consacrée aux minéraux est très importante, sans doute autant, voire plus importante que celle des plantes. La religieuse explique toutes les vertus de protection, de guérison et de purification des pierres en se basant sur l’enseignement de la médecine antique, des alchimistes, de sa compréhension mystique de la nature et de l’homme.
En reprenant la théorie des quatre humeurs d’Hippocrate, elle va distinguer les quatre tendances physiques et spirituelles de chaque profil d’individu. Elle va ensuite les relier aux éléments.
Hildegarde de Bingen va ainsi associer un mal physique, celui de la mélancolie (l’actuelle dépression) avec le péché originel présent dans la Bible. On retrouve aussi l’image du corps humain en tant que maison de l’âme : le cœur en est la porte d’entrée, le cerveau la cheminée, et les yeux l’âme.
Si ces associations peuvent dérouter, les intuitions d’Hildegarde de Bingen, notamment sur le fait que la Terre tourne autour du Soleil, démontrent pourtant une compréhension tout à fait étonnante de l’univers et de la physionomie humaine, et cela bien avant les avancées scientifiques. Elle sera par exemple la première à conseiller un rituel pour soigner les dents en faisant des bains d’eau, très semblable au brossage que nous pratiquons de nos jours.
Concernant les pierres, Hildegarde de Bingen offre ses conseils sur un grand nombre de minéraux. Son ouvrage sur le sujet, Le Livre des pierres, a été traduit et expliqué par Michael Gienger dans Les Pierres qui guérissent. Dans cet ouvrage, elle parvient à mettre en relation la couleur, la naissance du minéral (avec le contexte de la nature et ses effets sur la nature humaine) et les maux que chacun peut avoir.
Il est étonnant de voir comment, plus de 600 ans avant la naissance de l’étude contemporaine des minéraux, Hildegarde de Bingen a pu saisir l’origine du minéral, sa composition et ses effets sur le corps humain.
En faisant correspondre la formation du minéral avec l’ordre divin à l’origine de toute chose, y compris le corps humain, les descriptions d’Hildegarde de Bingen, confirmées par les avancées scientifiques, apportent toute la dimension spirituelle nécessaire à notre époque matérialiste. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les écrits de la religieuse sont redécouverts depuis quelques années.
Voyons maintenant comment Hildegarde de Bingen décrivait le minéral, avec le cas de l’émeraude (que nous détaillerons dans ce module). Voici ce qu’elle a écrit :
« L'émeraude pousse tôt le matin, au lever du soleil, lorsque ce dernier devient puissant et amorce sa trajectoire dans le ciel.
À cette heure, l'herbe est particulièrement verte et fraîche sur la terre, car l'air est encore frais et le soleil déjà chaud...
C'est pourquoi l'émeraude est un remède efficace contre toutes les infirmités et maladies humaines, car elle est née du soleil et sa matière jaillit de la fraîcheur de l'air.
Celui qui a des douleurs au cœur, dans l'estomac ou aux flancs doit porter une émeraude pour réchauffer son corps, et il s'en portera mieux.
Mais si ses souffrances empirent tellement qu'il ne puisse plus s'en défendre, alors il faut qu'il prenne immédiatement l'émeraude dans la bouche, pour l'humidifier avec sa salive.
La salive réchauffée par cette pierre doit être alternativement avalée et recrachée, et ce faisant, la personne doit contracter et dilater son corps.
Les accès soudains de la maladie vont certainement faiblir... »
Si la lecture de cet extrait peut surprendre par le ton et le langage, on voit que le vocabulaire utilisé est très concret pour parler d’une guérison très spirituelle. Dans l’extrait complet, la formation physique même de l’émeraude se retrouve dans le langage de symboles d’Hildegarde de Bingen.
L’émeraude est formée grâce à une transformation interne de la roche : d’un côté le béryllium et l’aluminium qui sont des roches claires (le « jour ») et de l’autre, le chrome qui est foncé (« la nuit »). Pour que ce phénomène se produise, il lui faut de la chaleur, décrite par Hildegarde de Bingen comme « la chaleur du jour ». On retrouvera dans sa description symbolique les données capitales de l’émeraude.
Quand Hildegarde de Bingen conseille d’utiliser la pierre pour tous les maux, c’est parce que son origine la fait correspondre à tous les moments de métamorphose de l’être humain (qui sont souvent accompagnés par une maladie ou un déséquilibre). La description du soleil matinal qui s’élève rapidement dans le ciel, symbolise l’action rapide, ordonnée et énergétique, quotidienne et répétée de l’émeraude. C’est aussi celle d’une élévation rapide suivant une organisation stricte (la cristallisation hexagonale).
Hildegarde de Bingen recommande cette pierre pour les crises d’épilepsie. Elle la conseille en traitement, pour apporter l’organisation qui fait défaut à une personne souffrant de crises avec une perte totale de contrôle. Le béryllium met en avant la discipline et la rigueur, et le chrome aide à l’autodétermination, à soigner les maux de tête et les faiblesses du système immunitaire. On sait également que l’émeraude est très efficace contre les rhumes et les sinusites.